Le 13 octobre 1307. Date importante : ce matin-là, le roi de France, Philippe IV le Bel, ordonne l’arrestation de tous les Templiers du royaume
Le 13 octobre 1307. Date importante : ce matin-là, le roi de France, Philippe IV le Bel, ordonne l’arrestation de tous les Templiers du royaume. Ils sont des milliers. Le roi de fer a décidé d’en finir avec ces moines-chevaliers, reconnaissables à leurs longs manteaux blancs ornés d’une grande croix rouge. Leur ordre avait été fondé en Palestine, près de deux siècles plus tôt. Il assurait la sécurité sur les chemins des croisades et, peu à peu, était devenu une sorte de banque pour les voyageurs.
Et d’où la colossale méfiance de la couronne de France à leur égard ; n’oubliez pas du reste que le roi leur devait beaucoup d’argent. Le roi Philippe a formé le projet de se débarrasser d’une puissance qui s’affranchit de lui et constitue presque un État dans l’État. Pour ce faire, on va les accuser de tous les maux, notamment de pratiquer des obscénités pendant leur rite et d’avoir renié le Christ. « Qui veut noyer son chien ». Donc, ce vendredi 13 octobre 1307, tous les Templiers de France sont arrêtés presque en même temps, au petit matin. Certains affirment que c’est pour cela que le vendredi 13 serait censé porter malheur. L’opération de police est orchestrée par Nogaret, le principal ministre du roi. Un procès a lieu. On interroge et on torture. 54 chevaliers sont d’abord envoyés au bûcher. Et en 1314, Jacques de Molay, le maître de l’ordre sera brûlé à son tour. Vous connaissez la légende qui veut qu’en mourant, il ait lancé une malédiction à ses bourreaux et donc au roi. « Avant un an, je vous cite tous à comparaître au tribunal de Dieu pour y recevoir votre juste jugement ! Maudits ! Maudits ! Soyez maudits ». C’est le point de départ de la saga de Maurice Druon, Les rois maudits. Adaptée plusieurs fois à la télé.
Un ordre monastique prestigieux
L’ordre du Temple est né en Terre sainte, en 1119, après la première croisade, pour protéger les pèlerins se rendant à Jérusalem.
Le prestige des moines-chevaliers au manteau blanc frappé d’une croix rouge est immense pendant les deux siècles que durent les croisades… malgré la trahison du grand maître Gérard de Ridefort à la bataille de Hattîn, en 1187.
Mais les musulmans finissent par chasser les Francs de Terre sainte et s’emparent de Saint-Jean-d’Acre le 28 mai 1291 malgré la résistance héroïque des Templiers.
Au début du XIVe siècle, l’ordre du Temple, chassé de Palestine, n’en dispose pas moins encore d’une force militaire impressionnante de quinze mille hommes, bien plus que n’aurait pu en lever n’importe quel roi de la chrétienté. Mais, de soldats, les Templiers se sont reconvertis en usuriers et ont complètement perdu de vue la reconquête des Lieux saints.
C’est que de considérables donations ont rendu l’ordre immensément riche et l’ont transformé en l’une des principales institutions financières occidentales… et la seule qui soit sûre. Il gère ainsi, en véritable banquier, les biens de l’Église et ceux des rois d’Occident (Philippe le Bel, Jean sans Terre, Henri III, Jaime Ier d’Aragon…).
Les commanderies templières couvrent l’ensemble de l’Europe médiévale d’une véritable toile d’araignée. Elles abritent les moines-soldats, avec aussi une vocation caritative.
L’opinion européenne commence à s’interroger sur la légitimité du Temple. Le roi Philippe le Bel lui-même a souvenance que les Templiers ont refusé de contribuer à la rançon de saint Louis lorsqu’il a été fait prisonnier au cours de la septième croisade. Il entend aussi quelques méchantes rumeurs sur les moeurs prétendument dépravées et diaboliques des moines-chevaliers…
Le drame
Le roi presse le pape d’agir contre l’Ordre et, finalement, décide d’arrêter les Templiers sous l’inculpation d’hérésie, sans prendre la peine d’en référer au pape.
C’est ainsi que tous les Templiers de France sont arrêtés au petit matin par les sénéchaux et les baillis du royaume au terme d’une opération de police conduite dans le secret absolu par Guillaume de Nogaret. Ils sont interrogés sous la torture par les commissaires royaux avant d’être remis aux inquisiteurs dominicains.
Parmi les 140 Templiers de Paris, 54 sont brûlés après avoir avoué pratiquer la sodomie ou commis des crimes extravagants comme de cracher sur la croix ou de pratiquer des « baisers impudiques ». L’opinion publique et le roi lui-même y voient la confirmation de leurs terribles soupçons sur l’impiété des Templiers et leur connivence avec les forces du Mal.
Pour ne pas donner l’impression d’être désavoué, le pape choisit la fuite en avant et, le 22 novembre 1307, ordonne à son tour l’arrestation des Templiers dans tous les États de la chrétienté et l’ouverture d’une enquête sur leurs crimes supposés.
Le roi obtient de Clément V la suppression de l’ordre, au concile de Vienne, en 1312. Elle est officialisée le 3 avril 1312 par la bulle « Vox in excelso », bien qu’il soit tout à fait exceptionnel qu’un ordre religieux soit purement et simplement dissous.
Avec l’affaire du Temple, la monarchie capétienne montre qu’elle entend suivre son intérêt politique et ne plus se comporter en vassale de l’Église.